C'est mardi, jour de marché. Comme chaque semaine Sésame s'apprête à effectuer son petit tour matinal, dans le but de repérer et d'acquérir un repas de premier choix. Tous ses sens sont sollicités, il se faufile entre les badauds, capte des bribes de conversation qui ne le concernent pas plus qu'elles ne l'intéressent. Quelques enfants attirent son attention. Il y a quelque-chose de directement accessible chez eux, un rapport direct, sans faux-semblant, sans mépris ni paroles inutiles, un contact franc, comme il les aime. Un regard, les enfants lui sourient et tendent leur bras maladroit vers lui, jusqu'à ce que leur impitoyable geôlier les rappelle à l'ordre en leur intimant l'ordre de ne plus guère prêter attention à notre ami. Qu'ils sont pénibles, ceux-là, avec leur air de tout savoir et leur bêtise crasse à voir du danger où il n'y en a pas, et de fermer les yeux sur les horreurs malsaines qu'ingurgitent leurs rejetons et le défaut de réelle attention dont ils sont victimes. Bref chacun ses problèmes, et Sésame n'est pas du genre à s'attarder plus avant sur ceux des autres.
Il observe les étals, flaire la bonne affaire, contourne, se détourne et contourne les étals bien achalandés malgré un hiver particulièrement rigoureux. Les légumes l'intéressent peu. Les poireaux généreux et les carottes colorées le laissent indifférents. Ainsi que les olives parfumées, encore qu'il ne rechigne pas à en goûter une de temps en temps, généreusement offerte par un aimable et généreux chaland.
Les fromagers le retiennent quelque peu, et tentant de récupérer du fromage, il renonce devant l'obstacle d'une longue queue d'acheteurs fidèles. Tant pis, pas de fromage. Encore qu'il se souvienne bien du petit chèvre parfumé de la dernière fois. "Encore toi, dégage d'ici ! ", lui lance le vendeur peu amène. Cela ne perturbe aucunement notre promeneur, qui se dirige un peu plus loin, vers un volailler-charcutier à la vitrine généreuse. la cible de notre compagnon est donc trouvée. Il s'approche sereinement, se saisit d'un chapelet de chipolatas aux oignons qui fera son bonheur, et file à toute allure, zigzagant dans le marché pour se mettre à l'abri, laisant derrrière lui un charcutier écumant de colère qui hurle : "Sale bête, il m'a encore volé de la saucisse, tu vas voir, toi, si je t'attrape, c'est direct la fourrière ! ".
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